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La saison 3 de Twin Peaks, analyses, explications, révélations 2

10 octobre 2017 | Actualités |

Dans l’épisode 2 (ou Part II), il y a un passage qui se déroule dans la loge noire entre Dale Cooper et, apparemment, Laura Palmer. Voici un extrait de leur dialogue (avec images) :
Dale : Qui êtes-vous ?
Laura : Je suis Laura Palmer.
Dale : Mais Laura Palmer est morte.
Laura : Je suis morte. Pourtant je vis.

Laura pose ensuite sa main sur son visage et le retire comme s’il s’agissait d’un masque. On voit à l’intérieur non pas un crâne sanguinolent, mais une vive lumière. Puis elle remet son visage en place.

Cette scène, malgré sa beauté poétique et visuelle, a de quoi déconcerter et laisser perplexe le spectateur. Voici la suite.

Dale demande quand il peut s’en aller. Allusion à la première tirade de Laura qui lui dit qu’il peut maintenant partir. Est-ce parce qu’elle lui a dit précédemment ou parce qu’elle s’est dévoilée ? qu’il semble évident à Dale que Laura sache comment il peut partir, se libérer de cet endroit — sa prison depuis 25 ou 26 ans. Salle d’attente ou antichambre d’un lieu mystérieux : la loge noire.
Laura le rejoint, lui donne un tendre baiser sur la bouche puis lui répond à l’oreille, comme on murmure un secret. Paroles entendues par Dale seul. (C’est d’ailleurs sur ce secret que se terminera la saison 3.) Dale sourit légèrement, puis devient très sérieux, très concentré sur les paroles… et il émet subitement un petit « Oh ! » (hoquet d’étonnement ? de peur ? de douleur ?) et semble réfléchir sur cette révélation. Puis Laura recule d’un pas, lève la tête vers le haut, prend peur et est brutalement arrachée de la pièce dans un long cri.

L’attention de Dale se porte sur les rideaux rouges qui bougent à cause du vent, ils se soulèvent, disparaissent et on voit au loin un cheval blanc. Zoom sur du noir. Retour sur le sol en zigzag labyrinthique. Dale ne semble pas avoir bougé de son fauteuil. Mike, à côté de lui, pose cette question :
Mike : Est-ce le passé ou est-ce le futur ?
On aura la réponse au dernier épisode. Cette scène dans l’épisode 2 annonce le périple à venir de Dale. Le difficile cheminement vers la liberté, la découverte de son vrai moi (du moins jusqu’à l’épisode 16). Ce que j’appelle Le Chant de la perle (1) de David Lynch où Dale est le prince et Laura la perle. Mais j’anticipe sur mes prochains articles.

Pour comprendre cette séquence mystérieuse, il faut se remettre en mémoire que pour les Gnostiques nous sommes des purs esprits, des êtres de lumière emprisonnés dans nos corps faits de cette matière dont s’est servie le Diable pour bâtir le monde.
Pour montrer qui elle est vraiment à Dale, pour affirmer son identité, Laura doit donc enlever la matière, le masque de la matière (son visage) et montrer sa lumière intérieure, sa substance véritable, son être profond… son âme. Certes, sa dépouille mortelle, son corps est mort, mais la vraie Laura, son âme, continue de vivre. « Je suis morte. Pourtant je vis. »
La vraie Laura est un être de Lumière. Est-ce pour cela ? cette aptitude à pouvoir montrer son être véritable qu’elle sera qualifiée de « The One » (l’Élue ou l’Unique ou l’Un, selon les traductions, l’Un étant le nom du Sauveur, le Christ pour certains Gnostiques valentiniens comme Marc) dans l’épisode 8.
Cette séquence, qui nous donne quelques clés pour comprendre la saison 3, est en fait une leçon initiatique pour Dale. Laura lui fait une révélation, entendue de lui seul. Mais ça le Diable (ou ses démons — les êtres maléfiques comme les woodmen ou Bob) ne le supportent pas… d’où l’expulsion brutale de Laura.

Il faut garder à l’esprit que pour les Gnostiques, il y a une guerre cosmique entre le vrai Dieu et le Diable, entre l’esprit et la matière, le Bien et le Mal, le Vrai et le Faux… Or, dans cette guerre, c’est le Diable (le mal) qui est en train de l’emporter. Notamment grâce aux actions (maléfiques, mauvaises, corruptrices) des hommes. Nous sommes piégés dans nos corps, dans ce monde appartenant au Diable. D’une part, on lutte contre des démons, mais aussi, d’autre part, contre nous-mêmes, contre nos doubles maléfiques.
C’est cela, entre autres choses, que Lynch met en scène avec Twin Peaks. En même temps qu’il montre le cheminement initiatique (et contre-initiatique durant les 2 premières saisons) (2) de Dale : son Chant de la perle.

J’en dirai plus dans le prochain article. À suivre…

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(1) Pour lire Le Chant de la perle avec un commentaire intéressant de Jacques E. Ménard et son équipe : http://www.persee.fr/doc/rscir_0035-2217_1968_num_42_4_2516

(2) Pour un très intéressant commentaire des 2 premières saisons et du film Fire walk with me, je conseille vivement la lecture de l’ouvrage de Pacôme Thiellement : La main gauche de David Lynch (PUF, coll. Travaux pratiques).

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